VEChain ou la technologie blockchain appliquée à la supply chain

VEChain ou la technologie blockchain appliquée à la supply chain

VEChain ou la technologie blockchain appliquée à la supply chain 3000 1575 Conseil stratégique & opérationnel I approche end-to-end | digitalisation de l'entreprise

Vous avez tous entendu parler du Bitcoin ? Créé initialement pour devenir une méthode de paiement libre de la supervision gouvernementale, de délai de transfert ou de frais de transaction, cette monnaie virtuelle ou cryptomonnaie est de fait devenue un actif financier spéculé par des millions d’investisseurs et dont la valeur presque eLe Bitcoin est ainsi en 2009 le 1er cas d’usage de la technologie appelée blockchain et le plus connu à ce jour. Depuis, il y a une multitude d’autres projets qui ont développé leur propre blockchain (Ethereum, Cardano…) et notamment avec des objectifs sortants du cadre de la financiarisation, orientés davantage vers des applications pour le monde industriel. VeChain a ainsi vu le jour en 2017 : son fondateur Sunny Lu, fort de son expérience en tant que CIO de LVMH Chine, est parti du constat du manque d’outils pour lutter contre la contrefaçon et garantir l’intégrité d’un produit.  VeChain s’est constitué en fondation, c’est-à-dire qu’elle ne se positionne pas comme une entreprise à but lucratif ou répondant à des actionnaires, elle vise à être un service répondant à l’enjeu d’accroître la confiance dans l’authenticité des informations tout au long de la vie d’un produit. Cet article vise à partager les mécanismes particuliers utilisés par VeChain ainsi que ses applications concrètes dans le monde de la supply chain.


Tout d’abord, reprenons les bases de ce qu’est une blockchain.

La blockchain est une technologie de stockage et de transmission d’informations permettant à ses utilisateurs, connectés en réseau, de partager des données sans intermédiaire. Aujourd’hui, une transaction d’achat de maison fait intervenir par exemple banques et notaires, ce sont des intermédiaires qui représentent un tiers de confiance garants que l’opération est approuvée et effective. D’autres exemples de transactions peuvent faire intervenir des assureurs, des plateformes en ligne, des fournisseurs d’énergie, des institutions de propriété intellectuelle etc. Le concept de la blockchain est de faciliter la gestion de transactions entre des personnes en se passant de ces intermédiaires en étant une sorte de grand registre  comptable que chacun est libre de consulter et dans lequel toutes les transactions sont consignées.  Une blockchain peut également être mise en place au sein d’une sphère d’utilisateurs privée (à l’échelle d’une entreprise par exemple), elle n’est pas forcément publique ouverte à tout le monde. Tous les participants à une blockchain sont appelés des nœuds du réseau. À tout moment, tous les nœuds hébergent une copie de la base de données dans lequel est inscrit l’historique des transactions effectuées depuis sa création et ils peuvent accéder à ces informations, ce qui rend son fonctionnement distribué. Le fait de ne pas posséder d’organe central de contrôle ne signifie pas qu’il n’y a pas de règle ; au contraire, le système est régulé par un protocole informatique permettant de spécifier dans le moindre détail le traitement des informations, ce modèle computationnel permet ainsi de créer la confiance nécessaire aux participants pour effectuer leurs transactions au sein de son écosystème tout en se passant de tiers de confiance. A la place, c’est la communauté qui valide de concert les transactions et qui se met d’accord sur une version de référence du registre, on parlera dans la suite de méthode de consensus.

Comme indiqué par son nom, la blockchain est une chaîne de blocs, chaque bloc regroupant un certain nombre de transactions similairement aux pages d’un registre. Afin d’être intégré à la chaîne, chaque bloc de données doit être validé par le réseau. Plusieurs méthodes de consensus ont été développées depuis la création de la blockchain.

Le premier protocole développé, né avec le Bitcoin, est la « Proof of Work » ou Preuve de Travail, c’est le protocole principalement utilisé aujourd’hui mais également remis en question. Des nœuds particuliers du réseau, appelés les mineurs, entrent en compétition pour résoudre un problème mathématique complexe (lié au chiffrement des transactions du bloc et à la liaison avec le bloc précédent) nécessitant une puissance de calcul importante et croissante en fonction de la longueur de la chaîne. L’ordinateur ou le groupe d’ordinateurs qui trouvent en premier la solution du chiffrement diffusent le résultat aux autres participants du réseau qui peuvent facilement valider sans requérir de puissance de calcul. Lorsque la solution est validée, elle est diffusée à l’ensemble du réseau et le mineur ayant trouvé la solution est crédité d’une récompense sous forme de cryptomonnaie. Cette course à la puissance de calcul entraîne des dérives : écologique via son caractère énergivore et d’intégrité via la possible remise en cause de la décentralisation du réseau (énormes fermes de minage).

Pour pallier ces limites a été développé en 2012 la « Proof of Stake » ou Preuve d’enjeu. Avec cette méthode de consensus la sélection du mineur est faite aléatoirement tout en étant pondérée par la quantité de cryptomonnaie à disposition de ce mineur, on parle alors de « staking » plutôt que de « mining ». Le fait de mettre en jeu tout ou une partie de ses possessions permet de garantir l’intégrité de la blockchain : plus une personne possède de cryptomonnaie, moins celle-ci a intérêt à la falsifier. La seconde cryptomonnaie après le Bitcoin, l’Ethereum, est en train de passer sur ce type de fonctionnement.

Le troisième principal type de protocole développé est la « Proof of authority » ou Preuve d’autorité : consensus d’intégrité qui donne à un nombre restreint et désigné d’acteurs le pouvoir de validateur, l’identité de ces « super-nœuds » étant publique et vérifiable par une tierce partie. Ce mécanisme ne mobilise quasiment aucune puissance de calcul, donc peu d’électricité pour son fonctionnement et à l’avantage d’être rapide. Sa limitation est le renoncement au schéma de décentralisation.

Comme cela a été expliqué, chaque nouveau bloc validé et ajouté à la blockchain est lié au précédent et une copie est transmise à tous les nœuds du réseau. Ainsi, l’intégration est chronologique, indélébile et infalsifiable, ce qui constitue la force de cette technologie.


Et VeChain dans tout ça ?

VeChain est un projet lancé en 2017 à la base sur la blockchain Ethereum puis depuis 2018 sur sa propre blockchain avec l’utilisation de la cryptomonnaie VET. VeChain est le 1er projet blockchain qui met l’accent sur la supply chain : son objectif est de permettre une meilleure collaboration numérique entre les entreprises en leur fournissant de nouveaux outils pour un transfert de données plus efficace et une gestion avancée de la chaîne d’approvisionnement. Elle permet à un produit d’être digitalisé grâce à un système comprenant une puce ou un code qui lui donne une identité propre (puces NFC, puces RFID et codes 2D). Ce procédé permet à n’importe quel moment aux utilisateurs de scanner via leur smartphone les informations sur le produit et d’en connaître tous les détails (fabrication, matériaux utilisés, stockage, etc.). La traçabilité des biens de consommation et alimentaires fait désormais partie des attentes du consommateur qui ne souhaite plus se retrouver avec de la viande de cheval dans les lasagnes ou du lait pour enfant contaminé. Exemple avec l’application Yuka qui donne le pouvoir au consommateur de connaître le contenu d’un produit : l’application a été téléchargée plus de 10 millions de fois prouvant la forte demande des consommateurs.

VeChain a séduit de nombreuses entreprises des secteurs de l’agroalimentaire, de l’automobile, de la logistique, du luxe et de la santé. Elle a noué depuis son lancement dans une vingtaine de secteurs de nombreux partenariats auprès de sociétés de renoms (DNV GL, Kuehne Nagel, Walmart China, H&M, LVMH, Renault, Bayer China…). Ses activités se sont développées à l’international à travers l’ouverture de bureaux en Chine où est basé son siège, à Singapour, au Luxembourg, au Japon, en France, en Italie et aux États-Unis. Avec 3 bureaux implantés à Paris, Milan et Chypre, le marché européen est prioritaire dans la stratégie de développement de VeChain en 2021. VeChain collabore également activement avec des Universités internationales reconnues telles que Tsinghua University, Stanford University, MIT, Oxford Mathematical Institute, City University of Hong Kong etc. pour développer ses capacités en R&D. VeChain est une des sociétés qui dépose le plus de brevets dans le monde dans le domaine de la blockchain,  classée dans le top 5% des start-ups par Early Metrics (l’agence française leader d’identification, notation et valorisation de start-ups innovantes et d’entreprises tech, à travers l’analyse de critères extra-financiers et financiers).

Les partenariats de VEChain par secteur d’activités

Par rapport à un service de tracking standard mis en place actuellement par beaucoup d’acteurs de la logistique, rappelons que l’innovation réside ici dans l’ancrage des informations sur une blockchain ce qui les rend infalsifiables tout en étant accessibles par tous : consommateurs, industriels, organismes de contrôle sanitaire… La confiance est ainsi le moteur de cette innovation.

Une puce RFID est intégrée dans le produit (une pièce de maroquinerie de luxe par exemple) et va suivre le produit durant toute sa vie : matière première, fabrication, transport, magasin de vente, reventes, etc. Cela permet de prouver l’authenticité du produit à toutes ses phases de vente et revente, de s’assurer que le produit n’est pas une contrefaçon. Pour les produits alimentaires ou pharmaceutiques, l’accent est mis sur la garantie de la qualité grâce à l’enregistrement de données de température, humidité, géolocalisation, qui sont contrôlables par les autorités sanitaires lors de l’entrée dans un pays par exemple.

Pour permettre cela, les équipes de VeChain se base sur une méthode de consensus de type « Preuve d’autorité » avec 101 nœuds identifiés et déclarés comme validateur. Par ailleurs, ils ont réussi à développer 2 grandes innovations dans le monde de la blockchain. La première consiste en un écosystème à 2 jetons (VET + VTHO) qui permet de séparer le coût de fonctionnement de la blockchain de la spéculation du marché. On peut en effet voir que les cryptomonnaies sont en majorité utilisées comme actifs financiers de spéculation ce qui entraine leur forte volatilité et donc peut freiner voire contrecarrer leur objectif initial.

Le VET est utilisé pour stocker de la valeur tandis que le VTHO pour payer les transactions. Par ailleurs, lorsque le VET est stocké il a un rendement et produit du VTHO (1 VET génère 0.000432 VTHO par jour). A chaque fois qu’une entreprise voudra réaliser une opération (écriture d’information ou tâches diverses) dans la blockchain (pour elle, pour ses clients ou pour ses partenaires), elle devra payer un micro-montant à l’aide d’une certaine quantité de VTHO. La demande en VTHO devrait augmenter au fur et à mesure que le nombre de partenaires de VeChain augmente, et que ces entreprises intègrent les technologies VeChain dans les différents aspects de leurs métiers. En toute logique, détenir des VET permettra à terme de produire des revenus passifs en revendant ses VTHO. Ces revenus passifs seront proportionnels à la quantité de VET que l’on détient, et à la demande en VTHO de la part des entreprises utilisant VeChain.

Les entreprises souhaitant utiliser VeChain consomment donc des VTHO quotidiennement, qu’elles achètent aux détenteurs de VET, ou qu’elles produisent elles-mêmes en revenus passifs si elles détiennent des VET. La dynamique entre ces deux jetons contribue à assurer l’équilibre du modèle économique tout en stimulant son développement.

Souvenez-vous que VEChain est une fondation, tous ses rapports financiers et mode de gouvernance sont publiés avec transparence. Une fondation se doit néanmoins d’être rentable et cela lui est permis d’une part grâce à la détention d’une partie des VET (5% de la valeur total des VET soit 3 milliards de VET sont détenus par les co-fondateurs et sont bloqués, ce qui leur a notamment permis de survivre à la crise des cryptomonnaies de 2018) et d’autre part grâce à leur seconde grande innovation qui est le BaaS : « blockchain as a service », donnant l’opportunité à n’importe quelle entreprise de se connecter à leur système.

Les BaaS sont des services cloud, tout comme les SaaS (Software as a Service), qui permettent aux entreprises de déployer facilement des applications blockchain basées sur une plateforme développée et maintenue par le fournisseur. Ainsi, les entreprises peuvent bénéficier des principaux avantages de la blockchain tout en s’affranchissant de la complexité technique.  Allant au-delà de la supply chain, VeChain a même été choisi comme solution d’archivage pour les enregistrements des tests COVID par Chypre et la république de Saint-Marin l’utilise pour émettre l’émission de certificats de vaccination numérique ; des avancées prometteuses pour l’écosystème VEChain.

La technologie de rupture proposée par VeChain et son dynamisme prouvé par la diversité des cas d’usage déployés justifie l’intérêt que devrait y porter le monde de la Supply Chain. Beaucoup de partenariats sont annoncés et sont encore aujourd’hui en mode pilote, une veille est nécessaire sur l’année qui vient pour confirmer ces résultats et la performance de son modèle économique.

Imaginons pour finir quelques possibles applications futures ! Ne seriez-vous pas plus enclin à acheter des bouteilles de grands crus (marché primaire ou encore plus pertinent pour le secondaire) si vous aviez l’assurance de la stabilité de ses paramètres de conservation au cours des années ?  Ne serait-ce pas une opportunité dans le développement de l’économie circulaire pour éviter de se faire arnaquer sur la contrefaçon d’une marque, le suivi de garantie et de SAV ou l’intégrité des composants d’un produit ? Les multiples projets de sérialisation en cours dans les industries pharmaceutiques ne devraient-elles pas se tourner vers la blockchain afin que les données puissent être facilement partagées entre les différents acteurs et instances de régulations ?  Et encore, à l’air de la mutualisation du stockage où 2 produits similaires de concurrents peuvent être stockés dans le même emplacement, cela peut être un moyen pour certifier la propriété du stock.

Source des images utilisées : https://www.vechain.org/

Julie Lemoine, Consultante senior, Groupe Citwell

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