Si la pandémie de Coronavirus a mis à mal le principe de l’open space au sein des Services Clients, des prérequis et facteurs clés de réussite sont nécessaires à la pérennité de l’activité. Dans le palmarès des fonctions où la règle est majoritairement au travail présentiel, alors que le télétravail semble largement possible, le métier Service Client figure en bonne place.
DE L’ADMISTRATION DES VENTES AU SERVICE CLIENT
Le quotidien des collaborateurs du Service Client, ou de l’Administration des Ventes si l’on emploie une terminologie qui tombe en désuétude, a entamé un changement significatif dans son champ d’action, et cette mutation ne peut aller qu’en s’accélérant. Dépassées les seules tâches de secrétariat consistant à la saisie de bons de commande transmis par un réseau de vente, l’heure est à la recherche de valeur ajoutée pour l’entreprise et ses clients, dans une intégration toujours plus accrue dans l’entreprise. La complexité des flux et transactions internationales à gérer, l’étendue toujours plus large des activités confiées, le rôle de plus en plus important accordé dans la relation aux clients, aussi en lien avec un nombre croissant de services de l’entreprise – commerce, production et logistique certes, mais aussi transport et douane, finance et comptabilité, qualité et réglementaire, pour ne citer que ceux-là – sont autant d’évolution subies par la fonction Service Client dans une immense majorité d’entreprises, de surcroît au sein de celles qui ont élargi leur zone de vente en dehors des frontières hexagonales.Si le terme utilisé pour qualifier ces profondes mutations est « subi », c’est bien parce que les équipes ont été peu préparées et accompagnées dans ces changements. Mis à part des changements de version logicielle, d’ERP ou la mise en place de CRM dans les meilleurs cas, les projets dont tire profit le Service Client demeurent bien rares. De fait, cet environnement complexe reste encore géré par des outils archaïques, pour le moins faiblement digitalisés et peu efficients : recours omniprésent au téléphone (sans trace du contenu des échanges le plus souvent) et surtout au papier qu’il soit annoté ou juste imprimé, avant d’être le plus souvent archivé… sans aucune autre justification qu’un « cela pourrait servir » ou autre « au cas où » quand ce n’est pas « on a toujours fait comme ça » !
UNE PRESENCE PHYSIQUE AU SERVICE DE LA COMMUNICATION A DISTANCE
Les activités du Service Client englobent une grande panoplie d’interactions avec différents interlocuteurs, qu’ils soient internes ou externes à l’entreprise. Cette présence à de nombreuses interfaces militerait pour une présence physique au plus près des opérations. Or, si les équipes sont parfois domiciliées dans les mêmes bâtiments que la production ou la logistique, l’immense majorité des échanges demeure par des moyens distanciels : téléphone, chat, et beaucoup, beaucoup d’e-mails. Comme bon nombre de services de l’entreprise composés de dizaines de membres, l’équipe Service Client s’est vu s’appropriée le mode de travail en plateau, le fameux « open space ». Si cette modalité de travail est utile pour partager rapidement et efficacement de l’information, quand il ne s’agit pas de s’entraider sur un flux client international particulièrement ardu, ou bien faciliter la montée en compétence de nouvelles recrues venues en renfort ou remplacement, elle n’en reste pas moins peu compatible avec le volume d’appels reçus et émis par l’équipe pour prendre, transmettre, agréger de l’information.
L’IMPACT DU TELETRAVAIL DANS L’EFFICACITE DU SERVICE CLIENT
Tel un chien dans un jeu de quilles, la pandémie de Covid-19 a fait voler en éclats ce mode de travail en plateau présentiel. Le télétravail, au moins pendant plusieurs semaines est devenue la norme. Si les connexions par téléphone ou e-mail ont pu être maintenues, tout comme les accès informatiques à distance, non parfois sans peine, les dossiers papier ont disparu, les requêtes d’entraide formulées à la volée par-dessus l’écran ne sont plus perçues que par les conjoints et les enfants, confinés à domicile. Si en théorie l’activité peut perdurer, l’efficacité et la fiabilité des informations et transactions traitées sont grandement affectées. Ceci reste tolérable en période de ralentissement de l’activité générale pour certaines entreprises, mais peut ne pas l’être pour les secteurs peu impactés par la crise sanitaire, et ne le sera pas sur la durée pour reprendre le fil un tant soit peu « normal » de l’activité de l’entreprise.
LE TELETRAVAIL VA-T-IL PERDURER AU SEIN DES SERVICES CLIENTS ?
J’en suis personnellement convaincu. Certains grands groupes le pratiquent déjà couramment, avec un certain succès. Et les entreprises qui ne le pratiquaient pas encore devront vraisemblablement voir ce mode de travail perdurer. Sans doute sera-t-il pratiqué à temps partiel uniquement, maintenant une certaine cohésion d’équipe et entretenant des interactions au sein de l’entreprise. Plutôt que d’opposer le télétravail au travail présentiel en plateau, en choisissant l’un OU l’autre, l’issue la plus raisonnable réside dans l’un ET l’autre. Les activités du Service Client se prêtent en théorie assez facilement à ce mode de travail, à condition de lever certains prérequis.
Les conditions nécessaires à l’application du télétravail pour les fonctions Service Client, au-delà des aspects purement techniques d’accès aux réseaux de l’entreprise et de disposer d’un espace de travail dédié et décent, résident dans la formalisation et l’harmonisation des pratiques, facilitant transferts de dossiers et intégration de nouvelles ressources, l’utilisation de réseaux sociaux d’entreprise et moyens de communications collectifs (chats, forum…) au détriment des e-mails, et surtout l’abandon du papier dans son immense majorité.
Cette digitalisation des activités nécessitera une refonte en profondeur des processus, brisant au passage certains mythes et préjugés, et ouvrira une nouvelle ère du profil type œuvrant au Service Client, moins centré sur la saisie et la production documentaire, mais plus intégré dans la transformation et la fluidification des informations, au bénéfice du service au client, de la pérennisation et du développement de l’activité de l’entreprise. Dans les « vieux logiciels » d’entreprise, la conduite du changement et l’adaptation des organisations semblent inéluctables.
Nicolas HENRY, Directeur, Groupe Citwell.