Optimisation du BFR : 4 questions à… Guillaume Allemand

Optimisation du BFR : 4 questions à… Guillaume Allemand

Optimisation du BFR : 4 questions à… Guillaume Allemand 2500 1250 Conseil stratégique & opérationnel I approche end-to-end | digitalisation de l'entreprise

Depuis quelques années les crises s’accélèrent. Elles sont multiformes (sociales, environnementales, sanitaires, géopolitiques), mais ont pour la plupart comme caractéristique principale de se transformer en crises économiques. Dans cet environnement incertain, l’entreprise doit être réactive et flexible sur 2 axes : son organisation et sa situation économique. Sur le plan financier, l’entreprise en temps de crises est soumise à une baisse significative de sa trésorerie. Dans cette situation, elle peut activer plusieurs leviers : augmenter son capital, céder des actifs, recourir à des crédits bancaires, mais aussi optimiser son BFR (Besoin en Fonds de Roulement). Le BFR devient donc un enjeu clé dans ces périodes de crises !

Guillaume Allemand,
Directeur Général Délégué,
Citwell

1. Quels sont les principaux leviers utilisés pour mieux maîtriser son BFR ?

1 – Réduire le BFR en s’appuyant sur la stratégie achat :
Aujourd’hui, nous adoptons avec nos clients des approches segmentées et différenciées plutôt que monolithiques. En fonction du niveau stratégique ou du degré d’importance du produit acheté et de la complexité du marché : les fournisseurs, les achats, et en particulier la dette fournisseur, seront optimisés de manière différenciée. Pour les « achats stratégiques », nous privilégierons la mise en place de partenariats avec les fournisseurs, intégrant des plans d’atténuation des risques et la mise en place d’outils d’optimisation des coûts de type EDI (Echange de Données Informatisé) et VMI (Vendor Mangement Inventory). Pour les « achats critiques », nous travaillerons davantage la diversification des fournisseurs afin d’éviter le mono-sourcing et les risques de dépendance inhérents. Sur les « achats leviers » et « achats simples », nous renforcerons la rationalisation des produits et fournisseurs, ainsi que la mise en concurrence de ces derniers, afin de négocier des termes de contrat plus avantageux en matière de prix et de délais de paiements.

2 – Réduire le capital immobilisé en optimisant la structure de stocks et les temps de cycle :
Sur ce point, l’entreprise devra accélérer la rotation de ses stocks, mais aussi réduire les coûts de la Supply Chain, en production et en distribution. Autrement dit, il est primordial de parler de « valeur des stocks » (versus volumes des stocks), en prenant en compte le coût complet de votre stock et de la vitesse d’écoulement de votre Supply Chain globale.

• L’accélération de la rotation des stocks :
En temps de crise, la demande est très volatile. Nous devons donc y répondre de manière plus réactive, et plus flexible. L’équipe Citwell intervient auprès de ses clients sur la redéfinition des niveaux de stock dans ces environnements incertains. Dans ce contexte, la bonne prise en compte dans la définition des objectifs de stocks des niveaux de service attendus, de la variabilité de la demande et du rallongement des temps de cycles est un point critique. La fréquence de revue des stocks devra aussi être adaptée et accélérée, afin de répondre à la forte instabilité des marchés.

• Les coûts complets :
Prenons pour exemple, le secteur du textile : pour certains produits d’habillement, le coût de transport amont est aussi coûteux que le coût d’achat. Il devient alors critique de prendre en compte dans la valeur du stock le coût complet du produit, dans une approche systémique intégrant les coûts d’achat, de la logistique amont, de la production et de la distribution.
Renforcés par la crise, ces enjeux reviennent à l’ordre du jour et doivent être traités de manière beaucoup plus globale.

3 – Maîtriser les créances clients à travers un pilotage renforcé de la relation aval :
Pour réduire les créances clients, nous pouvons activer de nombreux leviers internes et externes. Bien souvent, on croit à tort qu’il suffit de négocier avec ses clients des délais de paiement plus courts, mais en réalité il est avant tout primordial de fiabiliser le processus « order to cash » sur ses étapes clés. Il sera ainsi important de bien anticiper les risques de solvabilité dès l’étape de validation des nouveaux clients, de limiter les potentiels litiges administratifs avec ces derniers, de sécuriser les déclenchements de la facturation, d’automatiser ou au moins d’améliorer les relances préventives, amiables et précontentieuses, etc. Toutes ces actions, qui sont loin d’être exhaustives, réduisent de manière drastique le DSO (Days Sales Oustanding).

2. Quels sont les résultats que vous constatez chez vos clients ? 

Dans l’environnement actuel, nous pouvons obtenir une réduction rapide de la valeur du stock de 15 à 20 %, en remaniant notamment sa structure, et beaucoup plus encore lorsque nous avons les moyens de réduire les coûts complets. La baisse des créances clients (DSO) est le 2nd indicateur sur lequel nous pouvons obtenir des gains rapides du même ordre.
Enfin, en ce qui concerne la partie dette fournisseurs, calculée avec l’indicateur DPO (Days Payable Outstanding), les gains constatés peuvent se situer à court ou moyen terme en fonction des approches. Pour une approche pérenne, il ne faut pas se limiter à couper des coûts avec une vision court-termisme, notamment en négociant les conditions d’achats de manière systématique, en globalisant les volumes pour réduire le nombre de fournisseurs, avec le risque d’induire finalement des problèmes techniques et des ruptures de flux.
De manière générale, un plan d’optimisation du BFR permettra de créer de la valeur en diminuant votre actif économique, de limiter les facteurs d’érosion de la marge, de libérer du cash-flow organique afin de passer la crise, ou de financer de nouveaux projets stratégiques d’acquisition ou de croissance. Ces résultats renforceront l’image financière de votre entreprise, facilitant ainsi son accès aux marchés des capitaux et sa capacité d’emprunt auprès des banques.
Enfin, ce type de projet améliore la qualité de service de l’entreprise, par un meilleur pilotage et une fluidité accrue des processus sur l’ensemble de l’organisation, permettant ainsi d’appréhender l’avenir avec de meilleures perspectives.

3. Quels prérequis et bonnes pratiques faut-il mettre en œuvre pour optimiser son BFR ? 

Difficile de tous les lister ! Selon moi, il faut adopter une approche court terme dans laquelle vous allez générer des gains rapides, qui vont soutenir les travaux à lancer sur le moyen et le long terme. Dans ce cas, un travail peut être fait sur les stocks, sur le recouvrement des créances permettant d’obtenir des gains rapides et visibles dans l’entreprise. Toutefois, et pour ancrer tout cela dans le temps, il faut davantage travailler sur des plans d’action à moyen / long terme, afin de transformer, réorganiser, rendre son organisation plus flexible, plus réactive et résiliente face aux futures crises.

4 . Ces sujets touchent à la fois les flux physiques et les flux financiers. Est-ce le début d’un meilleur dialogue entre la Finance et la Supply Chain ? 

En réalité, cette crise renforce les besoins de synchronisation entre les différentes fonctions de l’entreprise. Les projets BFR étaient auparavant lancés par la finance et bien souvent déconnectés de l’accélération du flux Supply Chain, des problématiques terrain. Et pourtant, c’est bien cette approche orientée flux qui va permettre notamment de réduire les coûts et de dégager du cash. Aujourd’hui, nous voyons de plus en plus de directeurs industriels ou Supply Chain lancer des projets d’optimisation du BFR. Finalement, le rôle de la Supply Chain a toujours été transverse dans l’entreprise, en synchronisant les opérations commerciales et les opérations industrielles. Définitivement, le BFR est un bon sujet pour remettre de la communication entre les différentes fonctions de l’entreprise.

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