Depuis plusieurs années, La transformation de l’environnement politique, économique et social du secteur pharmaceutiquedéstabilise fortement les modèles Supply Chain des acteurs de cette industrie.
Les ruptures de stock en très forte hausse sur certains « Life-Savers » (Caelyx de Janssen, Vistide, etc.) et l’augmentation des scandales liés aux effets secondaires des médicaments ces dernières années (Isoméride, Distilbène, Médiator, Vioxx, etc.) sont autant d’indicateurs d’une rupture de paradigme qui pousse les différents acteurs à revoir leur organisation, notamment leur stratégie de réapprovisionnement, pour rationnaliser, optimiser et contrôler les flux d’un bout à l’autre de leur Supply Chain.
Les réseaux multi-niveaux, tentaculaires et massifs des entreprises du secteur sont cloisonnés et la demande du consommateur final fait l’objet de nombreux ajustements. Elle est redessinée par les politiques de sécurisation de tous. La fiabilité de l’appréciation du besoin est du coup nettement remise en cause lorsque chacun se dote de stock de sécurité plus important pour canaliser les variations de demande (« Bullwhip effect ») et d’approvisionnement (« Supply Disruption »).
Le Vendor Management Inventory propose une approche plus collaborative basé sur la confiance mutuelle et l’intérêt commun en donnant au fournisseur les rennes du réapprovisionnement de ses marchés, pour corriger à la source le désajustement offre/demande. En quelque sorte, on ramène la gestion du flux au goulot (appareil productif) dans une logique proche de celle de la théorie des contraintes.
La confiance n’excluant pas le contrôle, le marché et le « vendeur » (maillon amont) signent un accord de service pour cadrer la politique commune de réapprovisionnement. Les contraintes habituellement subies sont alors apprivoisées. Les deux parties s’entendent par exemple sur des seuils minimum et maximum de stock à respecter sur le marché. Grâce à une visibilité quotidienne sur l’état des stocks, les ventes et l’évolution des prévisions de la demande sur ses marchés, le « vendeur » optimise la gestion de ses priorités, consolide les demandes de ses différents marchés, et gagne en réactivité à court terme.
Avec du recul, l’objectif est de supprimer les comportements opportunistes pour rentrer dans une logique de rentabilité commune grâce à une collaboration quotidienne des différents maillons de la supply chain. Le fournisseur ne sert plus des besoins aveuglément mais considère les propositions de réapprovisionnements d’un outil de Distribution Resource Planning capable de capter des informations « au plus près » sur la situation des clients.
Les sources de variation de la demande sont identifiées et analysées plus rapidement, pour que les bons produits soient continuellement attirés vers les bons endroits aux meilleurs moments. Réduction drastique des stocks, amélioration du service client, augmentation des ventes, sont les résultats éprouvés par Sanofi, Novartis, GlaxoSmithKline, et d’autres.
Pour autant, l’approche VMI est-elle un remède suffisant pour ce secteur qui doit s’adapter aux exigences nouvelles d’un système devenu plus concurrentiel ?
Dans la pratique, ramener la gestion du réapprovisionnement au niveau du fournisseur a un impact plutôt limité. Alors que la mise en œuvre d’une collaboration à long terme tout au long de la Supply Chain, amorcée dans la démarche VMI et approfondie dans d’autres (JMI, CPFR, etc.), s’impose comme le fer de lance du renouveau de ce secteur.
De fait, le contexte de Tenders, la concurrence sur le prix des génériques et l’obligation réglementaire de maintenir des stocks importants en aval de la chaîne sont tout autant d’évolutions qui rendent légitime la mise en place de processus partagé de contrôle et de décision du type S&OP.
Charles Chamblas
Consultant